Faune et flore des volcans
Giuseppe Scarpinati - Correspondant Etna, Sant’Alfio (Sicile, Italie)
Article traduit de l’italien par Muriel Zanetto
Revue L.A.V.E. n°146 (septembre 2010)
Les coccinelles
--- de l'Etna ---
Introduction
La présence des coccinelles sur l’Etna, à une altitude comprise entre 1 800 et 2 800 mètres, est un phénomène que les randonneurs ont certainement déjà eu l’occasion d’observer. De fait, avec une population qui atteint son maximum du mois de juin au mois de février de l’année suivante, des dizaines d’individus qui appartiennent aux espèces « Cocinella septempunctata » et « Adalia bipunctata » se concentrent sous les pierres et dans les fissures de la lave. Les deux espèces, comme leurs noms l’indiquent, se distinguent respectivement par la présence de sept ou deux points noirs sur les élytres d’une belle couleur rouge.
Coccinelles sur un bloc de lave de l'Etna
Photographie © Giuseppe Scarpinati
À propos des coccinelles de l'Etna
Les coccinelles sont des insectes qui appartiennent à l’ordre des coléoptères (famille des Coccinellidae), bien connus de tous, il n’est donc pas nécessaire de s’arrêter sur leur description morphologique. Elles jouent un rôle important dans la lutte biologique contre la propagation des aphidiens nuisibles des plantes (pucerons), et la sympathie qu’elles inspirent aux zoologues et aux simples paysans se retrouve dans les petits noms qu’on leur attribue (en France les « bêtes à bon dieu » ou « bêtes de la Vierge »). Sous un aspect innocent, tant de fois raconté dans les fables, se cachent de formidables prédateurs insatiables, parfois même véritablement cannibales envers leur propre progéniture.
La présence des coccinelles à haute altitude n’est pas exclusive de l’Etna. On les retrouve aussi sur de nombreuses montagnes des zones tempérées, et leur nombre est parfois si élevé qu’on peut les récolter pour les utiliser dans le cadre d’un plan de protection des arbres fruitiers.
Celui qui observe les coccinelles cachées sous les pierres, apparemment transies de froid, est porté à croire que les pauvres bêtes, transportées par des vents violents, sont arrivées par hasard dans un lieu désert et inhospitalier où, par manque de nourriture, les attend une mort certaine. En réalité, il en est tout autrement.
Les coccinelles, obéissant à un instinct encore mal défini, effectuent volontairement un vol migratoire en direction des points les plus hauts de leur habitat (hypsotaxis) ; ce qui arrive toujours au moment où, dans les plaines à l’atmosphère tiède, la population des pucerons, qui représente leur nourriture, se raréfie de façon drastique. Les coccinelles, après avoir déposé les oeufs sur les plantes agrumes, bien nourries et repues, migrent vers les hauteurs de l’Etna et passent là de longs mois dans un état de diapause, à l’abri de leurs prédateurs (araignées, oiseaux et rongeurs). Au début du printemps suivant, lorsque la population de pucerons se reconstitue, les coccinelles sortent peu à peu de leurs cachettes et, migrant dans le sens inverse, envahissent les lieux où la nourriture est abondante pour quelque temps.
Il faut cependant ajouter une explication à la concentration de ces myriades de coccinelles. En d’autres termes, si elles migrent individuellement vers les hautes pentes de l’Etna, qu’est-ce qui les pousse à se retrouver si nombreuses sous la même pierre, renonçant ainsi à leur intimité (... si je puis me permettre d’utiliser un terme qui se réfère à l’espèce humaine) ? Il est probable qu’une fois le lieu choisi où s’effectue la phase biologique de diapause, les coccinelles se rassemblent car elles réagissent de manière identique à des facteurs microclimatiques (humidité, chaleur, lumière), ou bien parce qu’elles sont attirées par des stimuli odoriférants spécifiques (phéromones de trace) émis par la première arrivée.